Liberdade

Liberdade

Virginia Wolff

Virginia. Son seul prénom évoquait en moi la liberté. Prisonnière des mots et libre dans sa tête. Seule liberté qu'on lui octroyait. Emprisonnée dans son univers d'émotion et de folie qu'elle métamorphosait en mots. Prisonnière et libre tout à la fois, elle semblait ne pas être de ce monde. Elle semblait d'ailleurs. Un ailleurs rien qu'à elle et à ses mots.

 

Elle était belle. De ce genre de beauté hors normes, sans rayonnement apparent. Le genre de beauté invisible à l'œil, mais avec une absence dans le regard qui la rendait sublimement belle.

 

Elle errait dans ce monde, telle une somnambule égarée dans un univers qu'elle s'était construit, et où personne n'avait accès.

 

Depuis que j'avais vu le film, il me hantait. Jour et nuit. Je l'ai vu et revu, trouvant à chaque fois un moment de magie qui m'enivrait.

 

Virginia, tu fus pour moi l'étincelle qui ouvrit les portes de mon émotion. Je la cloisonnais derrière un bouclier, dur comme le fer ou fragile comme le verre, je n'en savais rien, mais il me protégeait. J'ai si peu pleuré dans ma vie alors qu'il y a tant de larmes enfouies au fond de moi. Et là, devant cet écran, devant ton personnage, devant ton regard, les pleurs ont surgi. Spontanément. Il me semblait me voir. Tu dégageais une telle force alors qu'on te disait fragile, un tel rayonnement alors qu'on te disait terne. Tu étais moi. A une autre époque. Dans d'autres circonstances. Mais je me suis reconnue en toi. Totalement. Dans toute ton authenticité, dans toute la vitalité que tu cachais en toi peut-être par crainte que les autres te la dérobent. Je t'ai aimée dès le premier instant. Je t'ai aimée jusqu'à la fin.

 

Les démons qui étaient en toi n'ont jamais été vaincus, malgré toutes les manières possibles et imaginables que tu as inventées pour les exorciser. Alors tu les as écris. Noir sur blanc. Des feuilles et des feuilles jaunies par le temps, remplies de toi, remplies de moi, remplies de tous ces êtres qui se cherchent et qui avancent dans la vie sans bien savoir où ils vont.

 

Je t'ai aimée Virginia, mais je n'ai pas aimé ta mort. Tu m'as trahie en te tuant, car la mort a voulu de toi. Tu m'as trahie, car si moi-même j'ai essayé par le passé de la rejoindre, elle, elle n'a pas voulu de moi.

 

J'étais pareille à toi, j'avais besoin de toi. Après ta mort, je me retrouve juste moi-même, avec tous les mots que tu m'as laissés et que je balance sur des feuilles blanches, qui un jour elles aussi seront jaunies par la vie qui passe. J'ai tellement de temps à rattraper. Depuis toujours, j'ai écrit des phrases et des chapitres et des livres, tant mon imagination était fertile. Depuis toujours, le souvenir que j'ai de moi est l'image de cette petite fille, de cette adolescente, puis de cette femme avec un crayon et une feuille de papier, prenant des notes, ci et là, où que soit l'endroit où je me trouvait, dans un parc, dans un café, dans un restaurant, même dans le noir au cinéma. Des tas de feuilles oubliées dans un tiroir, que je relis parfois comme pour dépoussiérer ma mémoire.

 

Aujourd'hui, grâce à toi Virginia, je continue à écrire. J'écris encore et encore. J'écris à chaque moment de mon existence, de mon errance, de mon voyage. Ce voyage qui un jour me conduira auprès de toi…

 

Dédié à Virginia Wolf « The hours »



15/01/2007
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